Créée
le 8 octobre 1984 par arrêté
du ministère de l'Intérieur,
elle regroupe des représentants de
toutes les directions actives de la Police
nationale ainsi que de la Gendarmerie nationale.
Elle est dirigée par le Contrôleur
général de la Police nationale
(Loïc Garnier depuis 2009), secondé
par un officier supérieur de gendarmerie.
Contrer
la menace
L’UCLAT
(unité de coordination de la lutte
anti-terroriste) effectue une évaluation
de la menace terroriste grâce à
une vision globale de la situation en France.
Elle participe à la synthèse
des opinions et fournit les pistes qui enclencheront
les décisions stratégiques,
juridiques ou politiques.
Le
13 novembre tous les effectifs de l’UCLAT,
une quarantaine de personnes, sont rappelés
au service.
Leur mission : opérer une veille
permanente sur tous les renseignements qu’ils
obtiennent de France ou de l’étranger.
Loïc Garnier, chef de l’UCLAT,
décide parallèlement la réouverture
d’urgence de la plateforme d’appel
de signalement, qui fonctionne habituellement
de 9h à 18h, « pour être
sûr de ne pas rater une seule information
qui pourrait nous être transmise par
ce biais ». L’objectif est de
faire une première analyse de la
situation et des actions qui doivent en
découler (posture Vigipirate, état
d’urgence...)
«
Nous essayons de prendre du recul. On doit
pouvoir se dire, avec une sérénité
difficile à conserver : voilà
ce qu’il se passe, et que peut-il
se passer tout à l’heure, demain
», explique Loïc Garnier. Un
représentant de l’UCLAT est
présent en CIC et en salle opérationnelle
de la police, pour transmettre les informations
et assurer un rôle de conseil. «
Nous devons être à la fois
discrets et efficaces. Ne pas gêner
l’opérationnel. Mon rôle
n’est pas d’être sur place,
c’est un poste très confortable
par rapport à nos collègues
opérationnels », avoue avec
humilité celui qui était chef
de la section anti-terroriste de Paris pendant
les attentats de Paris en 1995.
L’UCLAT
reçoit toutes les productions de
la DCI, DGSE, DGSI, DRM (direction du renseignement
militaire), DPSD (direction de la protection
et de la sécurité de la défense),
sécurité publique, gendarmerie,
ainsi que des autres ministères,
et est alors en mesure de se constituer
une vision globale et unique de la situation.
« Les renseignements que nous obtenons
peuvent être des choses qui paraissent
assez banales, comme des signalements, une
conversation qui a été
entendue, un comportement curieux…
explique Loïc Garnier. Je reçois
environ 450 mails par jour ! Nous devons
trier, selon la pertinence, en comparant
avec des éléments…
Évaluation
de la menace
Grâce
à toutes les notes des renseignements
civils ou militaires, l’UCLAT réalise
une synthèse, « avec un œil
exercé, car nous avons tous de l’expérience
en la matière », précise
le chef de l’unité. Ils étudient
aussi la propagande des groupes terroristes,
essayant d’interpréter, de
lire entre les lignes : « Nous regardons
les mots utilisés, les sites visés
en creux. Ce qui me marque, c’est
le ton qu’ils utilisent, le fait qu’ils
disent qu’il faut agir maintenant,
« tant que vous pouvez ». Il
y a une différence entre le dire
une fois et le dire dix fois dans la même
revue. La plupart des signaux forts proviennent
de l’addition des signaux faibles
». Certaines informations sont ensuite
relayées directement aux services
concernés, « nous ciblons les
récepteurs pour ne pas étouffer
les services et être sûrs que
les informations soient traitées
».
Chaque
semaine, l’UCLAT établit pour
le président de la République,
le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur
un « état de la menace ».
Cette note de 20 à 30 pages détaille
les faits, les renseignements reçus,
et donne la perspective de ce qui peut se
produire, si la menace semble augmenter
ou diminuer. En découleront les décisions
stratégiques et politiques. «
C’est nous, entre autres bien sûr,
qui avons la matière, c’est
donc à nous de fournir les pistes
», ajoute Loïc Garnier.
Si
« le mérite réside dans
l’action des services opérationnels
», comme le précise le chef
de l’unité, le rôle,
bien que peu visible de l’UCLAT, est
indispensable.
Une
fois par mois environ, Loïc Garnier
expose l’état de la menace
au SGDSN (secrétariat général
de la défense et de la sécurité
nationale), qui, en fonction, adaptera la
posture Vigipirate (augmentation de la protection
des écoles par exemple) et l’opération
militaire Sentinelle. L’UCLAT participe
aussi à la mise en œuvre de
certaines mesures induites par l’état
d’urgence. Concernant les assignations
à résidence, la DGSI ou la
PJ transmettent des listes de noms de personnes
à assigner à résidence,
avec les motivations (« tendances
radicales », « a manifesté
son intention de commettre un attentat »…).
« Nous rédigeons ensuite une
note blanche (une note blanche est une note
démarquée, c’est-à-dire
sans service signataire, qui émane
du ministère de l’Intérieur)
ainsi qu’un projet d’arrêté
qui pourra être amendé et signé
par la DLPAJ », explique Loïc
Garnier.
Pour
le blocage des sites internet « provoquant
à la commission d’actes de
terrorisme ou en faisant l’apologie
» comme le stipule la loi du 19 novembre
2014, la demande est d’abord faite
à l’UCLAT. Après une
vérification, c’est l’OCLCTIC
(Office Central de Lutte contre la Criminalité
liée aux Technologies de l’Information
et de la Communication) qui est en mesure
d’appliquer la procédure (notification
à l’hébergeur ou au
fournisseur d’accès d’une
demande de retrait d’un contenu).
« Ça n’empêchera
peut-être rien, si ça empêche
quelque chose on ne le saura pas, témoigne
le chef de l’UCLAT. Ne se voient que
les attentats qui réussissent…
»
Dé-radicalisation
«
La dé-radicalisation est en cours
de construction. Il faut inventer, tenter,
s’adapter. On ne peut pas appliquer
un traitement tant que l’on n’a
pas fait de diagnostic ». Aujourd’hui
l’UCLAT s’attèle à
observer, analyser les signalements. C’est
après avoir identifié des
facteurs de radicalisation que peut être
envisagée une démarche de
dé-radicalisation. « Si la
France est en pointe dans le domaine de
la détection de la radicalisation,
l’action de dé-radicaliser
n’est pas simple.
C’est
interministériel, cela nécessite
des infrastructures,du budget, recruter
les bonnes personnes… Nous voulons
monter des structures humaines et pédagogiques
solides ».
Depuis
les attentats du 13 novembre, l’UCLAT
est plus que jamais sur le qui-vive. «
On avait déjà chacun conscience
du fait que l’on n’a pas le
droit de se louper, pas le droit de passer
à côté d’une information,
ce n’est pas imaginable. Mais là,
ça s’est dramatisé ».
Travaillant dans l’ombre au service
de la France, Loïc Garnier termine
: « Ce métier, on y consacre
toute sa vie. On est à l’affût
de tout. On pense, on vit terrorisme 24h/24…
»
Organisation
Un
échelon central, structure réduite,
ayant des liens constants avec les autorités
administratives (préfets, préfets
délégués à la
sécurité) et les directions
de police;
Une
cellule implantée à Pau (Hautes-Pyrénées)
-
Des officiers de liaison en Europe :
Allemagne, Belgique, Espagne, Italie et
Royaume-Uni