-
Bio
Huitième
titulaire du poste depuis 1985, il succède
à Amaury de Hauteclocque
Né
le 31 janvier 1957 à Bages, dans l'Aude,
Jean-Michel Fauvergue jouit d'un profil "varié
au sein de la police nationale", souligne le
ministère de l'Intérieur. Depuis le
début de sa carrière, l'homme a fait
ses armes dans quatre directions différentes.
Il
"connaît bien les missions d'intervention,
métier de base du RAID ", pour avoir
été coordinateur des GIPN régionaux
(groupes d'intervention de la police nationale),
précise la place Beauvau.
Fauvergue
a été également en charge de
la sécurité d'ambassades de France
en Afrique (Bamako, Libreville) et a travaillé
en police judiciaire.
-
Amoureux des arts martiaux
A
son palmarès s'ajoute aussi la direction
de l'Office central en charge de l'immigration clandestine
(Ocriest). Jean-Michel Fauvergue est d'ailleurs
l'auteur d'un Rapport individuel d'expertise, appelé
"Riex" dans le jargon, sur "Les interconnexions
entre la traite des êtres humains et le trafic
des migrants".
A
la lecture de son curriculum vitae, on découvre
qu'il écrit, lit et parle l'anglais et l'espagnol
et possède même des notions de mandarin.
Sportif
invétéré, Jean-Michel Fauvergue
pratique entre autres le Wushu, sport de compétition,
dérivé des arts martiaux chinois traditionnels.
"
Le RAID va se développer "
---
Interview
: UNSA Police N°12 (Juin 2016)
Quel
bilan en tirez-vous ?
Pour
le RAID comme pour tout le monde, l’année
2015 a été une année importante.
Sans doute même l’année la plus
importante depuis la création du service.
Sans parler de nos interventions sur les attentats,
nous avons procédé à plus de
400 interpellations nationales, dont 130 terroristes
ou présumés comme tels, et sommes
intervenus sur 36 forcenés et 12 prises d’otage.
En outre, l’année 2015 marque aussi
une augmentation sensible du nombre de renforts
aux groupes de sécurité du président
de la République, du Premier ministre et
du ministre de l’Intérieur. Si l’on
y ajoute la gestion des rendez-vous internationaux,
on constate le gros investissement du RAID.
Les
attentats d’ampleur ont-ils soulevé
des enjeux nouveaux pour le RAID ?
Le
point de départ de l’intervention sur
des individus radicalisés, c’est Mérah
: un terrorisme low-cost, mais armé, dangereux,
et potentiellement porteur d’un gilet explosif.
Le RAID a mis à plat les techniques d’intervention
dans ce genre de cas, en synergie avec les autres
services de police. Un radicalisé n’est
pas un forcené ; la manière de l’appréhender
est donc forcément différente. Nous
avons potassé l’affaire Mérah
et les antécédents mondiaux d’actes
terroristes menés par des radicalisés.
Il en ressort que ces derniers ont tendance à
agir en trois temps. Tout d’abord, ils marquent
l’action, en tuant une ou des victimes à
haut potentiel affectif, médiatique ou politique.
Ensuite, ils se retranchent, volontairement ou non,
et ils sont retrouvés grâce à
l’excellent travail des services de renseignement.
Enfin, ils combattent en martyrs, en cherchant à
causer le plus de dégâts possible,
et, potentiellement, à créer un surattentat.
Ce schéma se vérifie en France, mais
aussi dans n’importe quel pays du monde qui
fait face à une menace similaire.
Qu’est-ce
que cela change sur votre approche de l’intervention
?
Avec
un forcené, on peut négocier, lui
faire prendre conscience de la situation. Le temps
peut alors jouer en notre faveur, pour lui faire
perdre sa motivation au profit d’une prise
de conscience de son intérêt à
se rendre. Mais étant donné qu’un
radicalisé ne se rend jamais, le facteur
temps a dû être repensé. Nous
agissons donc plus vite, tout en trouvant l’équilibre
pour éviter la précipitation. La négociation,
qui pouvait durer pendant des heures, devient simple
«contact», pour laisser la porte ouverte
à l’exception. Tout le process d’intervention
est donc plus rapide, et à ceci s’ajoute
le principe de non-réversabilité :
une fois que l’action est lancée, nous
allons jusqu’au bout, sauf rédition.
Les
services d’intervention sont ils les seuls
à devoir s’adapter ?
Notre
analyse démontre l’importance des primo-intervenants,
en particulier leur rôle en situation de massacre
sur la voie publique. Dans ce cas de figure, le
radicalisé ne s’arrête de tuer
que quand il est engagé, d’où
la nécessité d’équiper
et de former les primo-intervenants. Si ceux-ci
neutralisent la menace, l’affaire est réglée.
Mais même si ce n’est pas le cas, en
ouvrant le feu ils fixent la menace, qui sera alors
prise en charge par le RAID. Dans cette hypothèse,
les primo-intervenants ne doivent surtout pas aller
débusquer, ça, c’est notre travail.
Nous contribuons à des journées d’information
dans chaque DDSP, ainsi qu’à la formation
des BAC (brigade anti-criminalité) en petite-couronne.
De plus, nous avons formulé des conseils
techniques, notamment en matière législative,
où une protection est nécessaire.
Quels
sont vos rapports avec la gendarmerie ?
Mon
alter-ego est le chef du GIGN. Je le tiens en très
haute estime, c’est un homme d’honneur,
un professionnel compétent. Nous nous rejoignons
sur beaucoup d’analyses, et avons fait progresser
ensemble le cadre de l’UCOFI, l’unité
de coordination des forces d’intervention.
Notamment, nous avons oeuvré à la
possibilité de se renforcer sur nos zones
de compétence, par le principe du «menant-concourant»,
signé par le DGPN, le DGGN et le préfet
de police de Paris. Ce principe est simple : celui
qui prend le commandement de toutes les forces,
c’est celui qui se trouve sur sa zone de compétence.
Prenons un exemple fictif : une prise d’otage
dans un centre commercial en zone police. Nous avons
besoin de monde, j’appelle en renfort le chef
du GIGN. Nous nous répartissons les étages,
mais c’est moi qui dirige l’opération.
Ce commandement unique a pour objectif une meilleure
coordination afin de réduire le danger et,
bien sûr, éviter les pertes civiles.
Plus que de la théorie, c’est une doctrine
viable. Je n’ai aucun problème avec
le GIGN.
Comment
voyez-vous l’avenir du RAID ?
Le
RAID a réfléchi à la menace,
a travaillé sur ses process d’intervention.
C’est la seule unité d’intervention
européenne aussi implantée sur son
territoire. Nous allons implanter de nouvelles antennes,
et sommes capables de nous transformer en FIPN,
la force d’intervention de la police nationale.
Nous intervenons chaque semaine pour des individus
dangereux en milieu clos, travaillons sur les grosses
affaires avec toutes les directions. Le RAID va
se développer parce qu’il en a la volonté
et les moyens. Je lui prédis un avenir radieux.
Vous
recrutez ?
Nous
ouvrons un recrutement massif de 33 personnes au
minimum, sans compter les créations d’antennes.
Si au départ il y a eu peu de candidats,
la nouvelle de ce recrutement s’est depuis
propagée. Le protocole de recrutement est
le suivant : télégramme d’ouverture
de poste, puis tri des dossiers. Nous renvoyons
des dossiers à la DRCPN, pour des convocations
locales avec des prérequis fixés par
le RAID : test physique de base et visite médicale.
Passée cette étape, rassemblement
dans une école de police pour une série
de tests durant 10 jours. Ces tests étant
secrets, je ne peux les révéler dans
ces lignes, mais il s’agit principalement
de jauger la psychologie, le cran, l’endurance,
le professionnalisme et des compétences juridiques.